Par 2 décrets en date du 7 février 2012 (n° 2012-183) et du 28 février 2012 (n° 2012-275), complétés par un (pré) accord des partenaires sociaux en date du 6 février 2012, le gouvernement est venu encourager un peu plus le recours au chômage partiel comme alternative aux licenciements : hausse de l’allocation spécifique de chômage partiel ; possibilité de conclure une convention d’activité partielle de longue durée (APLD) dès 2 mois au lieu de 3, recours aux actions de formation en contrepartie du maintien de 100 % du salaire, contre 75 % auparavant. Par un troisième décret du 9 mars 2012 (n° 2012-341), c’est la procédure de mise au chômage partiel qui est modifiée.
Maintien de l’emploi contre sacrifices temporaires pour les salariés, maintien des compétences pour l’employeur, sauvegarde des statistiques pour les pouvoirs publics ; le chômage partiel a les faveurs du gouvernement dans le tropisme rhénan actuel.
Outre les situations dans lesquelles l’entreprise est confrontée à un sinistre, à des intempéries de caractère exceptionnel, à des difficultés d’approvisionnement en matières premières ou en énergie, à certaines causes sociales ou à une transformation, restructuration ou modernisation (hypothèses qui ne seront pas envisagées ici), un employeur peut recourir au chômage partiel lorsqu’il est confronté à des difficultés liées à une conjoncture économique exceptionnelle et passagère.
Dans le contexte de crise actuel, les pouvoirs publics déconcentrés sont invités à une certaine souplesse dans l’appréciation des difficultés économiques (circulaire de la DGEFP n° 2008/19 du 25 novembre 2008).
L’objectif de la mesure : délester temporairement la masse salariale de l’entreprise pour lui permettre de traverser la crise et faciliter une reprise d’activité.
Il y a chômage partiel dès lors que l’horaire collectif de travail est porté en-deçà de la durée légale du travail ou, si elle est inférieure, à la durée conventionnelle de travail ; que cette réduction résulte de la fermeture temporaire d’un établissement ou d’une partie d’établissement ou qu’elle résulte d’une réduction de l’horaire travaillé par les salariés (article L 5122-1 du code du travail).
Néanmoins, 3 dispositifs coexistent qui conduisent à distinguer 3 situations de chômage partiel :
- Le chômage partiel stricto sensus ;
- L’activité partielle de longue durée ;
- Le chômage partiel total pour une durée de plus de 3 mois.
Stricto sensu, et pour partir sur une base saine, le chômage partiel pourrait ne concerner que la réduction de l’horaire collectif des salariés. Une étape supérieure est franchie lorsque cette réduction a vocation à durer quelque peu : activité partielle de longue durée (APLD). Enfin, étape ultime, la fermeture d’un établissement correspond au chômage partiel total : lorsque cette fermeture dépasse 6 semaines, les salariés relèveront temporairement du Pôle Emploi.
Le chômage partiel : des obligations dérogatoires pesant sur l’employeur
Lorsqu’il recourt au chômage partiel à l’égard de la collectivité des salariés, l’employeur suspend le contrat de travail de ses salariés ; suspension au cours de laquelle il est tenu d’obligations dérogatoires à l’exécution normale du contrat de travail. Sous conditions, la charge financière de ces obligations pourra peser sur l’Etat, dans la limite d’un contingent annuel de 1 000 heures par salarié.
Avant de mettre en place le chômage partiel, l’employeur est tenu de consulter le Comité d’Entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel ; ce dont il informe le Préfet (article R 5122-2 issu du décret du 9 mars 2012). L’employeur n’est plus tenu de recueillir l’accord préalable du Préfet et supporte ainsi le risque d’un refus de prise en charge minimale a posteriori.
Soumis au régime du chômage partiel, le salarié bénéficiera d’une indemnisation qui inclut 3 éléments :
1. L’allocation spécifique de chômage partiel. Son montant est fixé, en suite du décret du 28 février 2012, à 4,84 € par heure chômée dans les entreprises de moins de 250 salariés et à 4,33 € dans les entreprises de plus de 250 salariés (contre respectivement 3,84 € et 3,33 € précédemment) ;
2. L’allocation conventionnelle complémentaire. Cette indemnité conventionnelle doit permettre de maintenir le salaire des heures chômées à 60 % du salaire brut du salarié, avec, a minima, le maintien d’un salaire horaire de 6,84 € (accord interprofessionnel du 21 février 1968 sur l’indemnisation du chômage partiel, modifié par l’avenant du 15 décembre 2008). Ces taux s’entendent allocation spécifique de chômage partiel incluse ;
3. L’allocation de garantie du SMIC. En tout état de cause, le salarié soumis au chômage partiel doit pouvoir conserver un salaire équivalent au SMIC au prorata du temps de travail habituellement travaillé (temps plein ou temps partiel).
Ces indemnités sont expressément exonérées de charges sociales et de la taxe forfaitaire sur les salaires. Elles demeurent soumises à la CSG (au taux de 6,2 % dans cette hypothèse : article L 136-8 du code de la sécurité sociale) et à la CRDS (au taux classique de 0,5 %).
Pour bénéficier de ces exonérations, il est évidemment nécessaire que l’employeur relève de l’accord interprofessionnel ou d’un accord équivalent. Seules les indemnités qu’il sera tenu de verser bénéficieront de ce régime de faveur. Ainsi, si un employeur est autorisé à mettre en place une mesure de chômage partiel mais ne relève pas de l’accord interprofessionnel ou d’un accord équivalent, seule l’allocation spécifique de chômage partiel et/ ou l’allocation de garantie du SMIC bénéficiera de cette exonération.
L’employeur est tenu au paiement de ces indemnités, à charge pour lui d’en obtenir, de manière variable, le remboursement.
Le chômage partiel : la prise en charge à géométrie variable des indemnités versées aux salariés
L’employeur ayant recours au chômage partiel pourra, désormais ‘ou non’, relever de deux régimes d’aide :
- Premier régime : l’employeur obtiendra le remboursement de l’allocation spécifique de chômage partiel et, le cas échéant, de l’allocation de garantie du SMIC ;
- Deuxième régime : l’employeur pourra également obtenir le remboursement d’une partie de l’allocation conventionnelle complémentaire.
Pour relever de ce second régime, l’employeur est tenu de conclure une convention avec le Préfet, adressant une demande à la DIRRECTE après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel sur i) la demande de convention de chômage partiel et ii) sur les mesures prévues pour le redressement économique de l’entreprise (article D 5122-33 du code du travail).
L’employeur justifie auprès de la DIRRECTE des raisons économiques, financières ou techniques des licenciements économiques envisagés et qu’il s’agit d’éviter par le recours au chômage partiel. Il justifie aussi des mesures prévues pour le redressement économique de l’entreprise.
Par la signature de la convention, dont un modèle type est fixé par arrêté, l’employeur s’engage à maintenir l’emploi des salariés concernés pour une durée au moins équivalente à la durée de la convention (6 mois renouvelable une fois). A défaut de respecter ce point, le Préfet pourra dénoncer la convention et l’employeur sera tenu de restituer les aides perçues.
Quel avantage ?
L’allocation conventionnelle complémentaire de chômage partiel pourra être prise en charge par l’Etat, en complément de l’allocation spécifique et de l’allocation de garantie du SMIC, selon une double limite (article D 5122-39) :
- 6,84 €, soit le montant de l’indemnité conventionnelle minimale de chômage partiel ;
- Indemnité à laquelle est appliqué un taux de prise en charge : en général à hauteur de 50 %, au maximum à hauteur de 80 % et, par dérogation accordée sur décision conjointe du ministre chargé de l’emploi et de celui chargé du budget, à 100 % (taux reconduits pour 2012 par arrêté du 24 février 2012).
L’activité partielle de longue durée : à aides supplémentaires, obligations renforcées
Lorsque l’employeur estime que le chômage partiel risque d’aboutir à une réduction plus durable de l’horaire collectif de travail, il peut choisir de conclure avec l’Etat, le Préfet ou la DIRRECTE, une convention dite APLD (Activité Partielle de Longue Durée) (article L 5122 2° du code du travail).
Les droits du salarié comme les aides de l’employeur sont renforcés, en contrepartie d’un enagement accru de ce dernier.
Antérieurement, la convention devait concerner du chômage partiel pour une durée prévisible d’au moins 3 mois et aboutissait à la conclusion d’une convention pour une durée maximale de 12 mois. Le décret du 28 février 2012 autorise, de manière temporaire, jusqu’au 30 septembre 2012, à conclure une telle convention dès que du chômage partiel est envisagé pour une durée minimale de 2 mois. L’employeur pourra donc, de manière anticipée, intégrer le régime de l’APLD.
Aux termes de la convention, l’employeur doit s’engager à maintenir 75 % de la rémunération brute des salariés concernés. Il perçoit, en contrepartie et dans la limite de 50 heures par salariés, une participation complémentaire de l’Etat, qui s’ajoute à la participation versée au titre du chômage partiel (v. supra) fixée en l’état à 1,90 € par heure (arrêté du 10 juin 2009). Au-delà de la 50ième heure, l’UNEDIC intervient et verse à l’employeur une indemnité de 3,90 € par heure. Les partenaires sociaux ont émis le souhait que cette indemnité soit fixée à 2,90 € versée dès la première heure (accord interprofessionnel relatif à l’APLD du 6 février 2012).
L’employeur s’engage également à recevoir les salariés concernés afin d’envisager avec chacun les actions de formation et de bilan de compétence pouvant être menées au titre du DIF (article D 5122-51). Si de telles actions de formation sont mises en place, l’employeur s’engage à maintenir intégralement le salaire du salarié (article D 5122-46 modifié par le décret du 7 février 2012), lequel bénéficiera du régime des heures de formation.
Enfin, l’employeur s’engage à maintenir l’emploi pour une durée équivalente au double de la durée de la convention, sous peine de voir la convention dénoncée et d’être soumis à l’obligation de restituer les sommes perçues.
Relevant du régime du chômage partiel, ces indemnités ne sont alors pas soumises à charges sociales, ni à la taxe forfaitaire sur les salaires.
Le chômage partiel total
Enfin, au-delà de 6 semaines de suspension totale d’activité, les salariés relèvent du chômage partiel total. Les salariés, sous réserve de l’accord préalable du Pôle Emploi, bénéficieront de l’aide au retour à l’emploi jusqu’à la reprise effective d’activité de l’entreprise.
Si la situation perdure au-delà de 3 mois d’inactivité, le Préfet décide, pour une durée limitée qu’il fixe, si les salariés peuvent encore être considérés comme étant « à la recherche d’un emploi ». En tout état de cause, la durée d’indemnisation des salariés est limitée à 182 jours ; date au-delà de laquelle l’employeur devra donc prendre une lourde décision.
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